Une chanson qui commence par cette vision de l’horizon comme frontiere au pays d’une felicite :
” On dit qu’au-dela des mers. La-bas sous le ciel net. Il y a une cite. Au sejour enchante. Et sous des grands arbres noirs. Chaque jour. Vers elle s’en va tout le espoir. ” Cette cite au ciel net, au-dela des mers, c’est la metropole lumiere qui a accueilli (et meme recueilli) Josephine Baker en 1925. Cette metropole qui fera de cette pauvre petite fille noire de Saint-Louis obligee de faire les poubelles pour manger, l’une des plus belles gloires des annees folles.
Idole des surrealistes, icone en Revue Negre, poule de luxe et grand-mere spirituelle de Grace Jones.
” J’ai deux amours. Mon pays et Paris. Par eux toujours. Mon c?ur est ravi. Ma savane reste belle. Mais a quoi bon le nier. Ce qui m’ensorcelle. C’est Paris, Paris tout entier. ”
” Ma savane ” fera reference au decor exotique dans lequel evoluait Josephine Baker sur scene – seins nus, une ceinture de bananes a la taille. Une fai§on de fetiche colonialiste qui fera dire a Robert de Flers, critique au Figaro, que le spectacle de Josephine Baker : ” un lamentable exhibitionnisme transatlantique qui semble nous Realiser remonter au singe en moins de moment que nous n’avons mis a en descendre. “
” Ma savane est belle ” : la savane, ca peut etre une metaphore concernant le sexe feminin, concernant le pubis…
” Mais a quoi bon le nier ” : ici, on marche a toutes les aveux…
” Ce qui m’ensorcelle, c’est Paris. Paris tout entier ” : Josephine Baker reste occupe i nous dire que renoncer a une moitie de Paris, c’est renoncer a une moitie des plaisirs, ainsi, c’est donc passer a cote de l’ensorcellement.
” Paris tout entier ” , ce seront les deux sexes reunis…
” J’ai deux amours ” fait donc echo a ce gout, tres annees folles d’ailleurs, pour la transgression et pour la bisexualite.
Inconsciemment, ” J’ai deux amours ” est un coming-out sur le desir libertaire d’une epoque qui n’etait gui?re plus en retard que la notre au sujet des confortables sexuelles
Dans le livre ” La femme est une dandy comme des autres “, Alister cite Georges Tabet, chef d’orchestre de Josephine Baker qui dit : ” Dans les annees 30, Josephine avait de breves rencontres saphiques avec de jeunes danseuses “.
” J’ai deux amours. Mon pays et Paris ” peut donc se traduire via ” J’ai deux amours. Les hommes et les femmes “, sachant que l’on prete a Josephine Baker, qui s’est mariee 5 fois et a adopte 12 enfants, des liaisons avec Colette et Frida Kahlo… Et qu’elle-meme se definissait comme une fille qui avait ” les seins d’un garcon de 17 ans “.
Donc, Lorsque l’on regarde beaucoup, Chris de Christine & The Queens n’a rien invente. Tout ce qui s’inscrit dans une histoire qui possi?de commence depuis un certain temps. Il semble net que Josephine Baker frequentait 1 milieu ou les m?urs etaient celles de revolutionnaires enivres au champagne ou l’on jouait nombre concernant l’ambiguite sexuelle. Il est des photos de Josephine Baker ou on la voit remettre J’ai coupe du plus beau travesti au concours du Bal des folles… Ca se passe en 1937 dans un night-club qui s’appelle le ” Magic City “, un endroit devant lequel ” J’ai manif Afin de tous ” aurait certainement scande des chefs-d’?uvre de slogans – si ” Notre manif pour l’ensemble de ” marchait de nuit…
” au moment oi? sur la rive quelquefois. Au lointain j’apercois. Un paquebot qui s’en va. Vers lui je tends les bras. Et le c?ur battant d’emoi. A mi-voix. Doucement, je dis Emporte-moi. ” Le paquebot, c’est bien sur la promesse de l’aventure. L’assurance de voyages que chacun ne fera jamais. Mais que Josephine Baker fera au sein des bras de ceux ainsi que celles qui voulaient d’elle…